MAMELLES’ STORY alias DEADLY WEAPONS de Doris Wishman (1972)

Publié le par Ludo Z-Man

Âmes sensibles s’abstenir.

Do you know that the female breasts known to be the source of life can be deadly weapons ?

 

Il est rare dans le monde du bis d’avoir à parler du travail d’une cinéaste de la gent féminine alors que, dans ce cinéma volontiers libidineux, nous rendons volontiers hommage aux femmes qui sont devant la caméra. Profitons de l’occasion pour parler de Doris Wishman, pionnière féminine du film de sexploitation, décédée en 2002, au même titre que son compatriote et inventeur du nudie, l’immense et génial Russ Meyer. Seulement, là ou Meyer va au cours des années soixante créer un style à lui tout seul et laisser une œuvre unique en son genre, la Wishman reste une pure et dure du cinéma d’exploitation tournant des séries Z ultra-fauchées avec un sens affûté du mauvais goût. Dans les années 70, tandis que la pornographie s’apprête à débarquer sur les écrans, elle se met à réaliser des polars violents et sexy comme cet incroyable Deadly Weapons dont nous allons parler aujourd’hui.

 

This is the story of Crystal who dance to wait to murder…

She avenged to her lover’s death with the only weapon she had and would deadly weapons !

 

Un homme apparemment sans reproche se retrouve mêlé à une affaire louche et entre en possession d’une document mettant en cause une bande de truands commandités par un chef mystérieux. Cette homme, c’est Gaylord St James que je suis content d’avoir reconnu, c’était le papa vengeur dans Last house on the left de Wes Craven, ce qui n’est quand même pas rien. Forcé de s’isoler, il est malgré tout rattrapé par les méchants et se fait flingué sèchement. Seulement, il avait une maîtresse à qui il avait confié le fameux carnet qui servait de preuve compromettante et cette dernière bouleversée par sa mort va vouloir se venger. Et la nana en question, c’est pas n’importe qui, c’est CHESTY MORGAN !!! Chesty, actrice hors concours née en 1928 en Pologne, icône mythique, et surtout ses 180 de tour de poitrine (!!!!!) qui ont fait sa légende. Dans la dernière émission de Mauvais Genres sur France Culture consacrée au strip-tease, on rappelait à quel point le fantasme de la grosse poitrine était répandu dans la culture américaine, ce qui fit sans doute la gloire de Chesty quand elle commença sa carrière dans les cabarets burlesques dans les années 60. C’est là bas que Doris Wishman repéra cette femme extraordinaire au sens propre du terme, incarnation parfaite du fantasme Fellinien, Fellini ne s’y trompant et la filmant en 76 dans son Casanova. Soyons clairs : quand Wishman filme la Morgan, on est clairement dans l’exploitation, quelque chose qui tient du freakshow pur et dur, ce qui peut laisser pour le moins perplexe (surtout que je dois l’avouer, malgré mon amour pour le cinéma de Russ Meyer, je suis loin d’être un bosomaniaque averti, mais bon, ça c’est une autre histoire…) même si au fond, elle ne semble pas lui demander autre chose que d’être là et de faire ce qu’elle faisait sur scène. Elle lui ménage même deux scènes de strip-tease.

 

Doris Wishman nous gratifie donc au bout de dix minutes de film d’une longue scène de bain ou on peut admirer l’anatomie de la Morgan et par la suite les inserts et gros plans sur ses seins monumentaux seront légion. Autour de sa star, Wishman tente tant bien que mal de raconter son histoire et là, on flotte dans la Quatrième Dimension. Disons qu’à l’instar de certains cinéastes Z (Ed Wood, Godfrey Ho pour ne citer qu’eux…), Wishman repousse si loin les limites de la nullité que son cinéma semble annuler la frontière entre le bon et le mauvais au point d’arriver à créer son propre style. Une mise en scène presque aléatoire où les règles élémentaires du filmage et du montage sont régulièrement bafouées au profit d’une revisitation iconoclaste des formes narratives et filmiques. Le découpage du film est une aberration absolue. Wishman filme les portes, les objets, les fleurs, aligne des stock-shots, répète certains plans. Le générique est incroyable avec des gros plans de miroirs déformant la poitrine de Chesty. Des fois, la caméra tente de capter quelque chose et loupe son cadre. Tant pis, on garde le plan. Le son est impressionnant : visiblement tout est post-synchronisé (à la machette d’ailleurs) et pour éviter d’en faire trop, Chesty n’est jamais cadrée quand elle parle. Pour palier à cette carence, on utilise une voix off qui explicite inutilement une intrigue ultra-téléphonée tandis qu’on admire ses seins une énième fois. Le rythme du film est totalement imprévisible, comme à contre-temps, stagnant dans une étrange léthargie, porté par une bande son easy listening très « porno seventies » (on notera d’ailleurs la présence du hardeur Harry Reems), puis de fulgurants climax comme ces scènes de meurtres littéralement indicibles ou la Chesty se venge en empoisonnant les meurtriers avec des pilules cachées entre ses seins puis les asphyxie avec sa poitrine. Le twist final du film est merveilleux, incroyable, j’en hurlais de joie devant mon écran. Il faut le voir pour le croire.

 

Après immortalisé une première fois sa vedette, Wishman allait remettre le couvert car simultanément elle tournait un autre film, Double Agent 73 titré en France Super Nichon contre Mafia (quel titre sublime, quelle poésie, on en parlera forcément de celui là !). Elle connu par le suite un passage à vide dans sa carrière malgré une fin des seventies marquée par son célèbre mondo Let me die a woman (1978) consacré à la transexualité. En 2002, le New York Underground Film Festival lui consacre un hommage en guise de consécration. Après son film avec Fellini, Chesty disparaît des écrans.

 

That is a film that is fast, furious, thrilling; exciting…

See the biggest event in the history of motion picture : DEADLY WEAPONS !!!

 

La page ultime sur Doris Wishman en anglais : http://www.sensesofcinema.com/contents/directors/02/wishman.html

Publié dans série bis

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A
<br /> <br /> Ha , depuis que je veux voir ce film !!!!!!<br /> j'ai presque tous les RUSS MEYER qui est un as dans le genre , mais jamais vu un avec CHESTY MORGAN , a part bien sur CASANOVA<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br />               Conan77 http://ssbbw-world.over-blog.com/<br /> <br /> <br /> <br />
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L
Cet article m'a donné envie de découvrir cette perle cinématographique. J'espere pouvoir dénicher ce film un jour.
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D
Pas mieux que mon éminent confrère! je ne connaissais pas ces deux noms (même si j'ai retrouvé la trace de celui de Wishman dans les articles de Bouyxou dans 'une encyclopédie du nu au cinéma").<br /> Très belle note qui fait, effectivement, bougrement envie. Où as-tu déniché une telle merveille? <br /> (NB : demain, Arte débute les diffusions de la tétralogie d'A.De Ossorio sur les morts-vivants templiers. A ne pas manquer!)
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L
Merci à vous deux.<br /> Flatté de vous avoir fait découvrir ces personalités atypiques.<br />  <br /> Je reparlerais de Godfrey Ho, c'est promis.<br />  <br /> Quant à Bouyxou, il était l'un des intervenants pertinents de l'excellente emission Mauvais genres consacré au strip tease.
D
Ca donne bougrement envie.J'ai appris deux trucs. L'existence de Doris Wishman. Puis l'existence de Godfrey Ho dont je n'ai jamais entendu parler.De plus, il y a une ters belle definition du cinéma dans votre article, notamment du cinema Z mais qui devrait s'appliquer à tous les cinémas. Tres belle formule. Bravo!Dr devo.
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